La valse des herbes rases berçait le cloitre et ses environs de sifflements saccadés. Tel les gémissements éreintants d'esprits disparus. La clarté jouait avec les ombres sauvages, sur les dalles, fourbues de leur course tortueuse. Les graines lumineuses et leur errance, en bas des arbrisseaux, roulaient entre la terre et dégringolaient aux côté de la vie invisible. Des falaises d'oxygène escaladaient les cheveux des passants, des autres prêtres, et ceux d'Eïkiko. Blonds, platines, de légères volutes abricots, et d'autres plus claires, Orpin, ou Orpin de Perse comme certains s'amusait à dire Cauchemar. Mélusine comme les humains l'appelaient. Sa peau topaze, " Tangerine" avait dit la déesse pour parler de ses mèches de feu. " Le fond de tes yeux est opalin, ta peau nakin, le creux de tes mains, jaune de Naples, le début de tes lèvres incarnat et leur intérieur gueules, comme les émailles héraldiques, leur cœur garance et leur éclat cinabre. Quand à tes yeux, ils sont d'ambre rouge et jaune. Mais surtout " Avait-elle ajouté, " La nacre de ton cœur est blanche de chine, aussi pure que celui de la statue de Pigmalion. "
Ses doigts passaient lascivement sur le rebord creux de la pierre granuleuse. Laissant le temps caresser l'éclat de son teint et la douceur de ses traits. L'observer en secret eut fait sentir son voyeur profane. Elle entendait les nymphes courir et chuchoter, elles lui souriaient. La jeune femme les regardait, avec habitude et indulgence. Ce n'étaient pas des inconnues, elles étaient ici depuis qu'elle était arrivée, elle les entendait toujours rire et se moquer, ou bien épier et courir se cacher. Leurs jeux et leurs lubies peuplaient les murs d'une folie inquiétante. Mais Eïkiko n'avait pas peur. Plus jeune elle se sentait intimidée. Leurs querelles et leurs emportements, cet esprit sanguin et volatil. Tout son opposé. Mais elle ne pouvait pas sans cesse rester au temple. Elle attendait patiemment que les audiences prennent fin, pour s'abandonner à la paix de ces lieux.